Invisibles, mais pas tant que ça ! Les métiers de la traduction et de l’interprétation fascinent et inspirent les créateurs d’œuvres littéraires et artistiques, à tel point que des traducteurs, traductrices ou interprètes occupent parfois le rôle principal d’œuvres de fiction ou livrent, à l’oral comme à l’écrit, les secrets de leur art en toute transparence.
Pour vous donner des idées de cadeaux de Noël (ou d’occupations culturelles pendant les fêtes), j’ai dressé une liste de films et d’ouvrages dans lesquels des professionnel·les des langues sont au cœur du récit et de l’action.
Cinéma (fiction)
L’interprète (2005)
Réalisateur : Sydney Pollack
Résumé : Interprète à l’ONU, Silvia Broome surprend par hasard une conversation révélant un complot contre un chef d’État africain. Traquée par des tueurs prêts à tout pour couvrir leurs traces, elle est placée sous la protection de l’agent fédéral Tobin Keller. Plus ce dernier découvre le passé de la jeune femme, plus il la pense impliquée dans la conspiration. Silvia est-elle victime ou suspecte ?
Critique : À voir à lire
La voix d’Aida (2020)
Réalisatrice : Jasmila Žbanić
Résumé : En juillet 1995 à Srebrenica, une professeure d’anglais prénommée Aida vient d’être réquisitionnée comme interprète auprès des Casques bleus, stationnés aux abords de la ville. Leur camp est débordé : les habitants viennent y chercher refuge par milliers, terrorisés par l’arrivée imminente de l’armée serbe. Chargée de traduire les consignes et de rassurer la foule, Aida est bientôt gagnée par la certitude que le pire est inévitable. Elle décide alors de tout tenter pour sauver son mari et ses deux fils, coincés derrière les grilles du camp.
Critique : À voir à lire
Le traducteur (2020)
Réalisateurs : Rana Kazkaz, Anas Khalaf
Résumé : Interprète de l’équipe syrienne aux Jeux olympiques de Sydney en 2000, Sami a été contraint de demander l’asile politique à l’Australie suite à un lapsus malheureux. En 2011, la révolution syrienne éclate et son frère est arrêté pendant une manifestation pacifique. Bravant tous les dangers, il décide de retourner en Syrie pour tenter de le libérer.
Critique : Abus de ciné
Les traducteurs (2019)
Réalisateur : Régis Roinsard
Résumé : Isolés dans une luxueuse villa coupée du monde extérieur, neuf traducteurs sont rassemblés pour traduire le dernier tome d’un des plus grands succès de la littérature mondiale. Lorsque les dix premières pages du roman sont publiées sur internet et qu’un pirate menace de divulguer la suite à moins de recevoir une rançon colossale, le soupçon pèse sur toutes les personnes présentes et l’atmosphère devient vite irrespirable.
Critique : Bérengère Viennot pour Slate.fr
Premier contact (2016)
Réalisateur : Denis Villeneuve
Résumé : Louise Banks, une brillante linguiste incarnée par Amy Adams, a pour mission de décoder le langage d’une race d’extraterrestres dont le vaisseau vient de se poser sur Terre. À mi-chemin entre le drame intimiste et le blockbuster d’invasion alien, cette adaptation de la nouvelle de Ted Chiang, L’Histoire de ta vie, publiée en 1998, a été saluée par le grand public comme par la critique, cumulant pas moins de huit nominations aux Oscars en 2017.
Critique : Le Mag du ciné
Documentaires
Des Voix dans le Chœur — Éloge des traducteurs (2017)
Réalisateur : Henri Colomer
Résumé : Troisième documentaire d’Henri Colmer consacré à la traduction, après Jean-Michel Déprats traduit Shakespeare (1993) et Claire Cayron traduit Miguel Torga (1994), Des voix dans le chœur s’intéresse au travail de Sophie Benech, Danièle Robert et Michel Vokovitch, qui en partageant leurs doutes, leurs hésitations et leurs trouvailles illustrent les coulisses d’un métier généralement mal connu et traité sur un mode anecdotique.
Critique : Télérama
Traduire (2010)
Réalisatrice : Nurith Aviv
Résumé : Traduire est le dernier documentaire d’une trilogie de Nurith Aviv sur la langue hébraïque. Ce film évoque les différentes expériences de traducteurs, et donne ainsi une idée des difficultés que l’on peut rencontrer en travaillant sur cette langue si riche. Toutes et tous partagent, chacun dans leur propre langue, leur vision de la profession et parlent avec passion de leur confrontation avec l’hébreu qui les amène parfois à transgresser les règles de leur propre langue.
Critique : Che Vuoi ?
Romans et nouvelles
La daronne (2018)
Autrice : Hannelore Cayre
Résumé : Désabusée et mal payée, Patience Portefeux est traductrice judiciaire. Elle traduit de l’arabe vers le français des conversations téléphoniques entre petits caïds, des comptes rendus d’enquête ou des auditions de suspects, ce qui lui permet de se retrouver un jour en possession d’une cargaison importante d’excellent cannabis : une aubaine pour monter sa petite affaire de trafic de stupéfiants au nez et à la barbe des forces de police. Cet ouvrage a été adapté au cinéma, dans un film réalisé par Jean-Paul Salomé, sorti en 2020, avec Isabelle Hupert dans le rôle de « la daronne ».
Critique : Onalu
La traductrice (2012)
Auteur : Efim Etkind
Résumé : Ce tout petit livre nous conte l’étonnante histoire de la traductrice russe Tatiana Gnéditch, condamnée à 10 ans de goulag en 1944. Au cours de l’enquête précédant sa condamnation, elle passe un an et demi à l’isolement, période pendant laquelle elle réussit à effectuer le travail le plus important de sa vie : la traduction du poème Don Juan de Byron (17 000 vers). Sans aucun livre à sa disposition, elle traduit le texte en partie de tête, en mémorisant sa propre traduction. Une réalisation et destin extraordinaires qui illustrent la place de la poésie dans la résistance intérieure aux dictatures.
Critique : Onalu
Le traducteur cleptomane et autres histoires (1994)
Auteur : Dezsö Kosztolányi
Résumé : Ce recueil de onze nouvelles, d’une ironie mordante, décrit les travers de l’homme et la décadence du monde qui s’annonce à l’aube du fascisme en Europe centrale. Dans chacune, le premier narrateur s’efface bien vite au profit de Kornél Esti, un personnage qui se met alors à exposer un épisode incongru dont il a été témoin ou auquel il a pris part. Dans la première nouvelle, il est question du destin étrange et tragique du traducteur Gallus atteint de cleptomanie.
Critique : Temps de lecture Blog littéraire
Vengeance du traducteur (2009)
Auteur : Brice Mathieussent
Résumé : Un traducteur français traduit le roman d’un auteur américain, mais pris par un impétueux besoin d’émancipation et désireux de faire entendre sa propre voix, il multiplie les notes de bas de page et les interventions, laissant de moins en moins de place au texte initial jusqu’à s’infiltrer tout entier entre les lignes.
D’ajouts en caviardages, de modifications subtiles en changements radicaux, il surgit au cœur même du roman, partie prenante de l’histoire d’un traducteur américain aux prises avec l’auteur français qu’il traduit.
Critique : Traduire
Essais
La langue de Trump (2019)
Autrice : Bérengère Viennot
Résumé : Traductrice de presse, Bérengère Viennot s’est trouvée confrontée à un défi inédit après l’élection de Donald Trump. Le président américain a fait exploser les codes de la parole politique. Sa langue est vulgaire et confuse, truffée de fautes de syntaxe et de phrases sans queue ni tête, de sarcasmes et d’invectives — signes d’un rapport dévoyé à la réalité et à la culture. D’une plume aussi désopilante qu’incisive, l’autrice raconte son casse-tête de traductrice et s’interroge sur le poids des mots en politique.
Critique : Traduire
Le poisson et le bananier (2012)
Auteur : David Bellos
Résumé : Ce livre est la traduction par Daniel Loayza, avec la collaboration de l’auteur David Bellos, de l’anglais Is That a Fish in Your Ear ? Translation and the Meaning of Everything publié en 2011. Ce n’est pas un manuel de traduction : il n’y est pas question de méthode ni de techniques, mais de ce que peut, et de ce que fait la traduction dans tous les domaines où elle intervient, du jeu littéraire à la diplomatie en passant par le tourisme ou le sous-titrage. Un livre malin et savoureux pour tous les amoureux de la langue et tous ceux qui aiment qu’on leur raconte des histoires.
Critique : Meta
Par instant le sol penche bizarrement (2021)
Auteur : Nicolas Richard
Résumé : Dans ses carnets décalés, le traducteur littéraire Nicolas Richard fait l’éloge de son métier d’artisan, dans l’exercice duquel chaque texte suscite son lot d’interrogations, d’émerveillements pour la langue — aussi bien anglaise que française — et la littérature. Il propose ainsi un florilège d’énigmes rencontrées au fil de sa carrière, riche d’échanges privilégiés (souvent cocasses !) avec différents auteurs, et invite le lecteur à se questionner, à douter, à enquêter et à s’amuser avec lui.
Critique : Babelio
Bandes dessinées
MOX
Auteur : Alejandro Moreno-Ramos
Résumé : Cette série de 4 albums de bande dessinée décrit avec beaucoup d’humour le quotidien de Mox, un traducteur indépendant heureux… sauf lorsqu’il doit traiter avec Pam, la méchante cheffe de projet, gérer les plantages de Crados juste avant les échéances, expliquer à sa petite amie Lena pourquoi tous les projets de traduction sont urgents et, surtout, s’entendre constamment conseiller de trouver un VRAI travail ! En anglais seulement
Traducteurs afghans : une trahison française (2020)
Auteurs : Brice Andlauer et Quentin Müller,
Résumé : En Afghanistan, la France a employé nombre de « tarjuman » (traducteurs en ourdou) pour épauler ses soldats dans leurs missions, mais suite au retrait de ses troupes à compter de 2014, elle leur a pour la plupart refusé l’asile. Brice Andlauer et Quentin Müller, deux journalistes familialement et intimement marqués par les précédentes « trahisons » françaises (des Harkis en Algérie et des Hmongs en Indochine), ont enquêté sur le terrain et en sont revenus avec ce livre dénonciateur en format graphique.
Tous ces films et ouvrages ont en commun d’avoir pour personnage principal un ou une traductrice ou interprète. Lucides ou complètement exagérés, ils donnent à voir le rôle de passeur d’histoires et de savoirs que nous jouons dans le monde entier, alors en cette période de froid polaire, installez-vous confortablement sur votre canapé et sous votre couverture préférée pour (re)découvrir sans modération ces récits dont vous êtes (un peu) le héros ou l’héroïne !
Si vous connaissez déjà ces œuvres, qu’en avez-vous pensé ? Reflètent-elles, au moins en partie, la réalité de votre activité ?
Pour aller plus loin :
- Liste de films compilée par Alexandra Le Deun (Hispafra)
- Top 10 des films en rapport avec la traduction (Be Translated)
- Les traducteurs au cinéma (Graham MacLachlan — Traduire n° 230)
- Les traducteurs de papier (Jean Delisle — Traduire n° 226)
- Le traducteur, personnage de fiction (Daniel Simeoni — Spirale n° 197)
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